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Chronique Amazonienne no 7

Derniers rebondissements familiaux

Nous reprenons l'avion ce soir pour l'ancien monde. Ces derniers jours ont été fertiles en émotions...
Après le Machu Picchu, nous avions décidé de visiter deux sites archéologiques importants : Chan-Chan et la Huaca de la Luna signalés par un ami grand connaisseur des pré-Incas et des Incas. Ces sites sont proches de Trujillo, la capitale du Nord du Pérou.
Nous savions que Juana et Edison vivaient à Trujillo, mais ils nous avaient prévenu que malheureusement, pour des raisons médicales, ils seraient à Lima. On allait se croiser, mais peut-être il y aurait une possibilité de se revoir à Lima la veille de notre départ.
Nous avions choisi un hôtel face à l'Océan (nous voulions absolument prendre un bain dans le Pacifique). Ce n'était pas à Trujillo même, mais à une dizaine de kilomètres, dans la sympathique station balnéaire de Huanchaco, spot incontournable des surfeurs du coin. De plus, elle n'était qu'à peu de distance de Chan Chan. Juana nous avait dit qu'on pourrait avoir éventuellement la visite de son fils Josef, mais ce n'était pas sûr.
Le lendemain, après avoir fait une belle promenade dans le joli cœur historique de Trujillo et visité un charmant musée installé dans une vieille demeure coloniale toute en boiseries, nous nous rendons à Chan Chan, un site Chimu (que je raconterai dans une chronique spéciale consacrée à la civilisation précolombienne).

À notre retour à l'hôtel, la réception nous apprend qu'un groupe de personnes est venu. Ah bon ?  Qui ? Nous n'en savions pas plus quand un coup de téléphone à la chambre nous apprend que le fils de Juana viendrait comme prévu nous rendre visite le lendemain vers 16 h après notre retour de l'autre site archéo, la Huaca de la Luna, un site somptueux dans les sables et construit d'adobe, ce sable fin mêlé à un peu de chaux et de paille. L'érosion ayant adouci les angles et les arêtes, les murs présentent une sensualité extrême toute en courbes très douces (j'y reviendrai aussi, d'autant qu'il se prête admirablement à la photo).

Nous venions de rentrer fatigués et après un petit bain (je trouve que les vagues tirent très fort, limite dangereuses) quand une grosse voiture noire genre 4x4 moderne arrive avec Josef, le fils de Juana et sa copine Patochi, une chinoise adorable parlant anglais bien mieux que moi (heureusement car Josef ne parle qu'espagnol). On s'embrasse et j'ai droit pour la première fois à un Tio (oncle) plein de révérence. Ils nous embarquent for lunch pour un restaurant dans le centre de Huanchaco. Ce sont des trentenaires branchés, lui avec jean déchiré à la mode et boucles d'oreilles, elle robe noire, sourcils soignés, bien maquillée. Première petite séance photo.



Nous mangeons du poisson grillé, la discussion est très animée avec Patochi qui est vive, sympathique, avec beaucoup d'humour. Joseph me montre sa gourmette avec Amiel écrit dessus et ses tatouages en hébreu avec notre nom. Pendant le repas, Juana appelle, un long coup de fil à son fils dont on comprendra par la suite le sens.
Josef travaille dans l'entreprise familiale de traitement et de conditionnement d'eau minérale : la fameuse AquAmiel. Il me montre sur son gros Samsung un petit film publicitaire qui passe dans les télés où on voit l'usine, les réservoirs, les machines, les tubes plastiques qui se thermoforment avec un grand AquAmiel écrit dessus, puis qui se remplissent (plusieurs milliers de litres par jour - ça devrait intéresser mon frère Jacky). Leur entreprise a l'air de bien marcher.
À la fin du repas où se sont échangés encore plusieurs coups de fils, Josef me demande de me pencher à la baie vitrée du restaurant  pour voir arriver trois voitures pleines de gens. Une bonne partie de la famille de Trujillo était là ! Une quinzaine de personnes de tous âges, des septuagénaires à des petites filles adorables de 4-5 ans.



Nous descendons et j'ai de nouveau droit à des Tio, des Primo (cousin) et des embrassades de tous. Je ne sais que dire : Gracias, Gracias, Gracias... et faire de grands sourires. Ils sont très affectueux et ne cessent de me regarder, de chercher des ressemblances, de me prendre dans leur bas et me tapoter le dos (hug). Heureusement Patochi qui a pris son rôle de traductrice au sérieux ne me quitte pas et traduit toutes les questions qui fusent et mes réponses.
Séances de photos générales et particulières avec les portables de chacun : Tio, Tio, Primo !
Ils se concertent ensuite et décident qu'on ira tous chez Tappner, l'aîné de la famille.
Pour s'y retrouver, je résume :  mon grand-père aurait eu donc mon père Elie au Maroc et trois autres enfants (deux fils et une fille) au Pérou, à Rioja, une ville assez éloignée d'Iquitos. Cette famille que je rencontrais est issue du plus jeune fils Moses (décédé) qui a eu sept enfants, ce qui explique la grande famille (pas toute venue). Il y là a trois des enfants de Moses : Tappner et ses deux sœurs : Edith et Estefits. Il y a là aussi les deux fils de Tappner, leurs femmes et leurs enfants.

Arrivés chez Tappner, nouvelles photos et plein de cadeaux. Danielle s'est faite copine avec les deux sœurs qui ne la lâchent pas. Tappner me montre ensuite diverses photos anciennes de la famille et un document généalogique qu'il a constitué d'où il ressort que son grand-père est né à Tanger en 1886. Ce qui me fait bondir car dans le seul document officiel que je possède (celui du Consulat du Brésil à Casablanca de 1929) la date de naissance consignée est 1882 à Rabat ! Ce n'est donc pas le même homme !
Peut-être était-ce la preuve que je cherchais ? Mais un autre élément me refait bondir, le nom que leur grand-père a donné est : David S. Amiel Benoualid. Une histoire de fous, ma grand-mère, sa femme, a pour nom de jeune fille Benoualid !
Mon grand-père aurait donc pu déclarer (l'état civil à l'époque était peu sûr) qu'il était de Tanger (d'où il était effectivement parti) et donner selon l'usage espagnol deux noms : le sien et celui de sa femme. La tradition patronymique espagnole est plutôt de mettre le nom de son père et celui de sa mère à la suite. Au fait, quel était le nom de jeune fille de la mère de mon grand-père ? Sa mère était-elle aussi une Benoualid ? Je ne sais pas, mais l'ensemble constitue un imbroglio incroyable...
Je n'ai plus aucune certitude ni dans un sens ni dans un autre. Maintenant, il me faudrait partir à la recherche d'un David S. Amiel né en 1886 à Tanger  et dont la mère serait une Benoualid ! cela me paraît très improbable, mais si je le trouve, j'aurais la preuve absolue qu'il ne s'agit pas du même homme. En attendant, comme je leur ai dit à tous : nous sommes de toutes façons de la même famille Amiel, forcément originaires du Maroc et, si on remonte le temps, d'Espagne, probablement d'Andalousie !!! Qu'importe le degré de parenté, le hasard et nos recherches nous ont fait rencontrer. Nous avons et nous aurons plaisir à communiquer et c'est magnifique que la vie nous procure autant d'émotions.



Je goûte enfin l'Aquamiel ! Ils m'offrent deux verres, un pour Jacky, un pour moi).

Il se fait tard, Patochi et Josef nous raccompagnent, mais avant, Josef nous propose de passer chez ses parents pour faire la bise à sa jeune sœur.
La maison de Juana et Edison est assez remarquable, Art Nouveau 1930, beaucoup d'art chinois (le grand-père de Juana était un célèbre cinéaste à Canton), belles sculptures et tableaux d'inspiration nativos d'Iquitos, belle chaise à bascule en bois du grand-père chinois où je me suis assis pour une nouvelle photo. Tous ces beaux objets exotiques pour nous, jouxtant des étoiles de David, plusieurs Menorah, et à l'entrée, une grande mezuza dorée.



Avant de quitter la maison, nous avons eu le plaisir d'écouter un mini récital de piano de Naysha, la plus jeune des filles de Juana et Edison.

Le lendemain, retour à Lima-la-Grise. Comme lorsque nous l'avons quittée, une sorte de vapeur couvre la ville, le ciel est uniformément gris. D'après Michel Tapiéro, l'été c'est pareil, avec de temps en temps un peu de soleil qui perce (Herman Melville considère Lima comme "la ville la plus triste du monde").

Pour notre dernière soirée, nous avions prévu de revoir Ariel l'historien, Carmen et son mari, l'autre branche de la famille qui nous avaient reçus chez eux à notre arrivée. Michel s'est occupé de nous réserver un bon restaurant où nous nous retrouverions tous (Carmen et son mari Ruben, Ariel, sa copine, et bien sûr Michel et sa femme Pitty).
Il a été pour nous un véritable ange de gentillesse, il nous a envoyé un chauffeur à l'aéroport, nous a réservé un meilleur hôtel, particulièrement charmant, dans le même quartier de Miraflorès où il a son bureau.
Arrivés à l'hôtel en milieu d'après-midi, nous avons vite déjeuné sur place puis sommes partis faire quelques achats dans un quartier (indiqué par Michel) pas très loin où se trouvent plusieurs marchés : Indien, Inca, Péruvien, etc.
C'est incroyable la variété de tissus très colorés, de statuettes incas en céramique, en bois, en pierre, d'objets venus des tribus de nativos, de bijoux élaborés, de fourrures en alpaca (l'alpaga est un mélange d'alpaca et d'autres fibres), etc. Le tourisme marche bien et les magasins sont bondés.
Revenus à l'hôtel, un message de Juana nous donnait rendez-vous à 19 h dans l'appartement d'une amie juste en face du grand centre commercial (genre Polygone Riviéra) Larcomar que nous connaissions bien pour y être allés lors de nos premiers jours à Lima.
Et nous voilà repartis pour un très bel immeuble avec grandes baies vitrées ouvertes sur la mer au huitième étage.

Accueillis par Edison, Juana et son amie Roxana, très sympa et parlant anglais (ce qui a grandement facilité la communication avec Juana et Edison qui ne parlent qu'espagnol).
Nouvelle séance photo, nouveaux cadeaux (on ne m'en a jamais fait autant), le dernier en date, un chapeau offert par Edison (qui me va pas mal). Je l'ai porté toute la soirée à Larcomar où nous sommes allés manger ensuite : poulet rôti, antichucos (brochettes) avec les chicharos, beignets dont ils raffolent pour dessert.
Juana et Edison repartaient le soir même pour Trujillo en car pullman (Juana le préfère à l'avion).
Adieux affectueux et bien sûr des : "revenez vite, notre maison vous attend", etc.
Moi qui n'avait pratiquement pas de famille du côté de mon père fils unique, je me retrouve avec une nouvelle et grande famille particulièrement chaleureuse. Ce qui me fait penser que depuis la mort de ma mère, de mes tantes et de mes oncles, le peu de famille qui me reste s'est dilué considérablement.

Le lendemain, notre avant-dernière journée et dernière soirée au Pérou. Encore quelques courses, puis Michel vient nous prendre pour le dîner. Circulation toujours folle dans cette ville où la notion de code de la route n'existe quasiment pas (seuls les feux rouges sont à peu près respectés).
Nous arrivons au beau restaurant choisi par Michel où nous attendent déjà Carmen et mon cousin Ruben. Nous nous retrouvons avec plaisir. Carmen a suivi de près mes chroniques et m'a sans cesse envoyé de gentils mots d'encouragements sur fb. Elle a bien compris ma quête romantique d'autant que c'est elle qui l'a initiée il y a aujourd'hui trente ans en rencontrant Brigitte Amiel à Jérusalem. Elle et son mari nous montrent une très grande affection et j'ai encore droit à un joli cadeau (une étoile de David en argent).

Ariel arrive avec sa jolie copine et nous passons une joyeuse soirée en anglais, espagnol et français...
Séances de photos à table, puis debout. Ariel, Michel et sa femme Pitty semblent bien s'entendre avec Carmen et son mari, ils se reverront... Carmen a vu Ariel à la télé il y a quelques semaines, il va lui envoyer son livre. J'ai aussi longuement discuté avec elle, je lui ai raconté la soirée à Trujillo avec la grande famille sympathique issu de Moses et aussi celle de la veille avec Juana. Mon rôle de primo était bien rempli.

Nous sous sommes quittés en nous promettant de rester en contact et de nous revoir.
Le dernier jour avant de prendre l'avion, Michel est venu nous récupérer pour déjeuner ensemble dans son bureau, en fait, une jolie petite maison à deux étages couverte de boiseries. Son ONG canadienne travaille sur des projets miniers au Pérou et il y règne une bonne atmosphère de travail. Nous avons sympathisé avec ses collaboratrices au cours du déjeuner avant de prendre, un peu excités, le taxi pour l'aéroport.

Voici close momentanément cette aventure. Danielle et moi sommes heureux d'avoir vécu tout cela : un grand voyage chez les Incas, une virée dans la jungle et des retrouvailles familiales...
Avec toutes les photos, films et documents, il me reste à écrire un livre et un film....

 

 

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