VINCENT VAN GOGH

LE JOURNAL DE LA MAISON JAUNE

site : vangoghaventure.com

 

Vingt-cinquième semaine


Pont de Trinquetaille 13 oct


et un autre pont où passe le chemin de fer.552


peint amoureux cyprès verts. Quatrième toile du jardin du poète qui est la décoration de la chambre à Gauguin. 556



coin de jardin avec amoureux. 552

chambre à coucher tout simplement. La carrure des meubles doit maintenant encore exprimer le repos inébranlable.
coloré à teintes plates et franches comme les crépons. 554

 

 

Lundi 15 octobre
ça m’inquiète que Theo soit neurasthénique. Juste au moment où ça va bien pour moi. Le travail l’épuise et j’ai l’impression que je l’épuise aussi par mes demandes continuelles d’argent. Mais comment faire autrement. Je serais moi aussi malade si je ne pouvais peindre plus que si je ne mangeais pas. Mais la peinture est une maîtresse qui coûte très cher.

 

Mardi 16 octobre
Je ne sais pas si Theo a envie de vendre mon travail. Pourtant mes dernières peintures sont dans les meilleures que celles que j’ai faites. Il dit qu’il n’est pas pressé de vendre. Je suis d’accord avec lui, mais d’ici peu de temps, il faudra commencer à se rembourser. Bague, Trip lui ont pourtant dit qu’ils commençaient à s’intéresser sérieusement aux Impressionnistes et Thomas doit m’acheter une toile. J’ai aussi besoin d’être rassuré. Et de vendre prouve que mon travail devient intéressant.


Mercredi 17 octobre
Le gaz que j’ai fait mettre dans l’atelier va nous permettre d’avoir une meilleure lumière pour travailler et aussi pour peindre encore le soir en hiver. Nous y gagnerons de nouvelles toiles et ma décoration va se compléter d’autres tableaux de nuit.
Je ne comprends pas pourquoi les peintres ne peignent pas la nuit. C’est si riche de tons différents. Tout prend une autre couleur et les contrastes, les ombres sont plus marquées.

Jeudi 18 octobre
Quand je me sens exalté, mes sentiments ne sont plus moroses comme avant où mes sentiments de persécution me taraudaient presque tout le temps. La culpabilité permanente qui se dispute en moi au besoin d’agir, de travailler comme un forcené se calme un peu. Je n’ai plus ces temps-ci l’impression qu’on ne m’aime pas et qu’on me juge mal.
J’ai plutôt des idéaux de vie éternelle et d’infini qui sont dans ma tête au moment de dormir.

Vendredi 19 octobre
Les Impressionnistes ne sont pas qu’une école technique d’expériences optiques. Ils ont réellement une tendance à ouvrir sur des choses grandes, sur une autre façon de regarder la nature. Quoi qu’ils en disent, on sent bien que ce sont eux qui influencent maintenant les jeunes peintres et même la peinture hollandaise.

Samedi 20 octobre
Je suis en train de peindre une grande toile de cyprès avec un couple qui passe. Cela fera la quatrième toile de jardin qui complètera la décoration de jardins pour la chambre à Gauguin.
Au début, je ne voulais y mettre que des grands tournesols, mais les jardins sont plus riches de couleurs et répondent bien à tous les jardins qu’il voit de ses fenêtres.


Dimanche 21 octobre
Gauguin arrive demain. J’ai tout mis en place. J’ai fait sa chambre comme un boudoir de femme réellement artistique. Il y a tout ce qu’il faut pour être tranquille et peindre bien.
Je lui ai préparé une toile.
J’aurais accompli mon rêve et pour Gauguin, ce sera un point de départ.
Les lettres qu’il m’a écrit prouvent que nous sommes sur la même longueur d’onde, même si je suis moins avancé que lui, que mes conceptions sont moins raffinées que les siennes, j’ai un appétit grossier de bête…
Je suis curieux de savoir comment il va trouver mes dernières toiles. Il verra de toutes manières que j’ai beaucoup changé et que ce séjour ici m’a beaucoup appris. Je sens maintenant que je sais à peu près ce que je veux et que j’ai trouvé une manière pour exprimer avec de la couleur les sentiments que je veux mettre. Il va sûrement un peu m’influencer mais je suis sûr maintenant de garder mon originalité propre. Il y a peu de peintres qui sont allés aussi loin ou aussi fort avec la peinture, qui ont autant poussé la couleur.
La nature n’a pas peur d’offrir parfois des contrastes violents ou des couleurs éblouissantes.

 

Travail en cours