Visite chez Hartung

 

 

Avec ses murs blancs aux pans découpés sur un fond de gazon planté d'oliviers vénérables, le parc apparaît blanc et vert, et le bleu du ciel dessus. De plus près, les formes blanches se font volumes, parallélépipèdes d'une blancheur immaculée troués de quelques fenêtres. Ils ont l'air posés là, parfaits dans leur simplicité.
On longe un mur, notre hôtesse ouvre une porte donnant sur une superbe terrasse surplombant Antibes avec au loin, la mer. Au premier plan, une grande piscine, profonde, très bleue bordé par un rythme de murs, de portes et de fenêtres. Tout semble juste, arrête la vue et en même temps l'ouvre sur l'infini. C'est la maison de Hartung et de sa femme Anna Eva Bergman. Ils l'ont voulu comme ça. Ils l'ont dessiné avec l'aide d'un architecte, mais elle est née de leur esprit. Elle est leur esprit, ils l'ont habité et l'habitent toujours.
Les pièces sont larges, carrées, exprimant le repos, la mise à l'écart des tensions. Meubles simples, confortables, fenêtres offrant des vues comme des tableaux, d'ailleurs leurs dimensions sont celles des grands tableaux. Rien sur les murs, un choix très rare chez les peintres. Mais les fenêtres suffisent.
On prend ensuite le chemin de son atelier. Les oliviers sont tous superbes, forts, sûrs d'eux. Notre accompagnatrice m'apprend que les bâtiments ont été construits en respectant les plus beaux oliviers.  
Sur le gazon, des milliers de petites fleurs, taches de jaune doré sur un vert tendre. On est bien chez un peintre. C'est à dire chez quelqu'un qui a un regard sur le monde, qui le voit mieux que nous, qui l'a compris et qui sait en exalter la beauté.
Rien n'est au hasard, chaque volume est soigneusement pensé. Chaque ouverture a sa raison d'être, chaque matériau est à sa juste place. Grandes dalles de grès au sol, épaisseur des murs, précision des ouverture. On est dans un univers rationnel et en même temps dans un espace spirituel laïque. On a envie de s'asseoir pour réfléchir et juste regarder longtemps, s'imprégner du silence.



On arrive à l'atelier. Impossible de le confondre avec un autre. Sur les murs, les chevalets, les outils, et même sur le plafond, on reconnaît le style d'Hartung. Et si sa plus grande œuvre était là, son atelier...
Ses pinceaux de formes extravagantes, balais de toutes tailles, de formes étonnante, la sulfateuse qui lui servait à projeter la peinture sont posés là,  prêts à l'emploi. Hartung est présent dans chaque tache de couleur, dans chaque forme, sur n'importe lequel de ses dessins affichés sur un mur ou posés sur la longue table. Ce qu'on appelle le style, la manière reconnaissable entre toutes, l'originalité de ce travail au cœur de la peinture.